Juillet 2023
La Loi n° 1.549 du 6 juillet 2023 portant adaptation de dispositions législatives en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive, a été publiée le 14 juillet 2023 au Journal de Monaco (la « Loi »).
Le Conseil National présente cette Loi comme « … le premier acte d’une nouvelle séquence de réforme législative visant à confirmer l’engagement de Monaco au respect des normes internationales et à renforcer l’efficacité de ses mesures en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive ».
Elle créé l’Autorité Monégasque de Sécurité Financière (l’ « AMSF »), remplaçant le Service d’Information et de Contrôle sur les Circuits Financiers, tout en étendant les obligations des personnes assujetties aux obligations de vigilance et en précisant les sanctions y afférentes.
- En ce qui concerne la création de l’Autorité Monégasque de Sécurité Financière :
L’AMSF remplit trois fonctions, celle de renseignement financier, de supervision, ainsi que de sanction. Les différentes fonctions de l’AMSF peuvent communiquer des informations entre elles.
Elle est, par ailleurs, chargée de mettre en place des recommandations à destination des professionnels assujettis, dans l’objectif d’une plus grande clarté dans l’exécution de leurs obligations de conformité.
Elle est également amenée à définir des questionnaires à destination de ces professionnels, ayant l’obligation d’y répondre dans un délai à déterminer, afin d’établir leur profil de risque.
De même, la fonction de supervision de l’AMSF contrôle en continu les conditions d’honorabilité[1] des personnes assujetties, non pas seulement au début de leur activité.
Jusqu’ici, les sanctions étaient proposées par une commission et prononcées par le Ministre d’Etat. Désormais, dans un objectif de plus grande indépendance, la fonction de sanction de l’AMSF est habilitée à sanctionner directement les comportements fautifs. Le Ministre d’Etat conserve sa compétence pour toute sanction affectant une autorisation donnée par lui.
Le service exerçant la fonction de supervision de l’AMSF transmet les manquements qu’il constate à la fonction de sanction de l’AMSF. Il met l’entité visée en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception de régulariser sa situation. Celle-ci dénonce les manquements constatés, les obligations légales méconnues ainsi que les sanctions encourues. Elle fixe un délai de régularisation, ne pouvant être inférieur à huit jours et supérieur à un mois.
Une fois le délai expiré, la fonction de sanction peut intervenir. La sanction administrative pécuniaire en cause peut dans un premier temps atteindre 5.000 €. Elle est doublée en cas de récidive.
De même, La fonction de renseignement de l’AMSF peut transmettre toute information à l’autorité judiciaire dès lors qu’une déclaration de transaction suspecte fait apparaitre des faits de blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme ou de la prolifération des armes de destruction massive, ou de corruption, conformément à la Recommandation n° 29 du G.A.F.I.
La transmission des déclarations de soupçons détenues par l’AMSF à l’autorité judiciaire est quant à elle subordonnée à ce que l’enquête pénale en cours fasse apparaitre des indices graves et concordants de commission de faits de blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme ou de la prolifération des armes de destruction massive, ou de corruption.
Leur anonymisation est effectuée par l’AMSF, le Procureur Général ou le juge d’instruction, pour protéger l’identité du déclarant, sauf si la révélation de son identité est nécessaire à la recherche de sa responsabilité.
- En ce qui concerne l’extension des obligations des personnes assujetties :
Concrètement, concernant les personnes assujetties, les obligations à leur charge sont affinées qu’il s’agisse des éléments à prendre en compte pour cartographier les risques inhérents à une opération financière, ou sur les éléments à prendre en compte pour cette identification. De même, les obligations de documentation sont étendues.
Les modalités d’exercice de la déclaration de soupçons seront déterminées par Ordonnance Souveraine.
- En ce qui concerne les modalités de contrôle de la mise en conformité :
Le « registre des bénéficiaires effectifs – sociétés et GIE » et le « registre des trusts » sont maintenus, la définition de bénéficiaire effectif est maintenant identique à celle du G.A.F.I.
L’accès à ces registres peut cependant être étendu à des enquêtes relatives à d’autres infractions que celles visées par la Loi, tant qu’il respecte les conditions relatives aux personnes habilitées à leur consultation. Autrement dit, une consultation effectuée par une autorité non habilitée pourra être invalidée[2].
Cependant, l’accès à ces registres dans le cadre de la coopération internationale avec les entités analogues à la Direction de la Sûreté Publique ne peut plus se faire que pour la recherche des infractions visées par la Loi. L’échange d’informations entre la Principauté de Monaco et un Etat étranger est donc limité aux prévisions des conventions internationales les liant.
Les procédures de contrôle internes des assujettis doivent désormais être communiquées aux autorités compétentes dès leur édiction ou leur actualisation, avec obligation pour l’autorité d’en accuser réception et d’en tester un échantillon.
Des dispositions réglementaires sont attendues pour préciser les modalités d’application de la présente Loi ainsi que sa date d’entrée en vigueur, fixée au plus tard au 30 septembre 2023.
Notre équipe reste à votre disposition afin de vous accompagner ainsi que de répondre à vos questions en la matière.
A.L.F.A. MONACO
[1] Elles seront définies par Ordonnance Souveraine
[2] Articles 22-5 et 64-2 de la Loi, modifiés, relatifs au registre des bénéficiaires effectifs – sociétés et GIE, et au registre des comptes bancaires et des coffres-forts respectivement